Éric Ciotti installe le nucléaire au cœur de sa campagne

REPORTAGE – Le député a visité, jeudi, la centrale de Civaux qui espère être en capacité de redémarrer ses deux réacteurs dès janvier.

La question nucléaire s’est imposée dans l’agenda très chargé du candidat à la présidence des Républicains. Entre une réunion militante mercredi soir à Paris en compagnie de Rachida Dati et un meeting à Dieppe, Éric Ciotti s’est levé très tôt jeudi matin pour se rendre sur le site nucléaire de Civaux, dans la Vienne. «La gestion de la politique énergétique de la France sera la faute lourde du double quinquennat Macron-Hollande», prévient d’emblée le député des Alpes-Maritimes, en campagne au pas de course pour la présidence des Républicains face à Bruno Retailleau et Aurélien Pradié.

Le candidat s’est fixé l’objectif d’échanger directement avec 80 fédérations sur les 103 du parti LR, avant le premier tour de scrutin le 3 décembre. Et aujourd’hui, dans ce département qui ne compte plus que 299 adhérents contre 1600 en 2007, il est venu défendre ce qu’il considère comme un patrimoine idéologique. «Nous sommes les héritiers de la famille gaulliste, celle qui a écrit les pages les plus créatrices de la Ve République et inscrit les plus grands projets français des soixante dernières années. Défendre cette filière, c’est aussi défendre une autre façon de faire de la politique», appuie le parlementaire.

S’il a décidé de se rendre sur le site nucléaire de Civaux jeudi, c’est pour éclairer sa lanterne concernant l’immense défi énergétique auquel la France est confrontée, alors qu’un risque de pénurie électrique menace le pays avant les grands froids de l’hiver. Sur les 56 réacteurs nucléaires nationaux, 26 sont à l’arrêt. «Je viens ici pour comprendre pourquoi. Avant les pics de consommation électrique prévisibles, cette situation nous fragilise considérablement», explique le parlementaire, en route vers les deux immenses cheminées qui surgissent rapidement dans le paysage, après avoir quitté Poitiers.

La centrale de Civaux, dernière-née des centrales françaises lancée en 1997, est en pleine révision décennale. Les deux réacteurs les plus puissants de France espèrent redémarrer en janvier comme prévu même s’ils ont été confrontés à deux défaillances distinctes: un problème de microfissures lié à la géométrie des circuits et un écoulement faiblement radioactif. Pour le directeur Christophe Rieu, qui guide la visite du parlementaire, les deux sujets sont parfaitement maîtrisés. «Nous sommes mobilisés pour être au rendez-vous», assure-t-il, mais le planning du réacteur 2 reste encore à déterminer. De leur côté, les écologistes locaux réclament un moratoire parce qu’ils estiment que les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour un redémarrage dans deux mois.

Définir une vision nationale

Très identifié sur les questions sécuritaires, Éric Ciotti veut élargir son image à d’autres thématiques comme il l’avait fait lors du dernier congrès LR , en se démarquant sur certains sujets économiques comme la suppression des droits de succession. Jeudi, la cinquantaine de militants poitevins réunis sur le «rooftop» de Poitiers l’a applaudi quand il a rappelé son projet. Cette campagne interne est une occasion pour lui de définir une vision nationale, au-delà de la reconstruction des Républicains qui s’apprêtent à faire voter 91.110 militants dans quinze jours.

Éric Ciotti sait aussi que la compétition peut être rude. Bousculé par un article du Canard enchaîné affirmant que son ex-épouse, Caroline Magne, aurait «cumulé» trois emplois à Nice, au département des Alpes-Maritimes et à l’Assemblée nationale, le député a été contraint de publier un communiqué cette semaine. Il affirme que le total des activités de son ex-femme n’a «jamais dépassé quarante-quatre heures par semaine». Auprès du Figaro, il dénonce les «boules puantes malheureusement de plus en plus fréquentes dans la vie politique», alors que dans son entourage on note que le sujet était dans l’air depuis les dernières législatives. Certains situent l’origine des «attaques» au niveau du territoire niçois. «On sait que la politique est de plus en plus dure. Il faut avoir le cuir épais. C’est surtout difficile pour les proches», confie le candidat.

Si la production nucléaire fut l’un des atouts industriels de la France, le député ne veut pas s’en tenir aux rappels historiques. Il veut aussi dénoncer «ceux qui ont mis en péril» cette industrie en prenant des décisions allant «contre les intérêts supérieurs de l’État». À ses yeux, les deux derniers présidents de la République en portent l’entière responsabilité. «La programmation pluriannuelle de l’énergie de 2020 et la loi qui avait décidé la fermeture de 14 réacteurs nucléaire furent une erreur tragique. C’est aussi le meilleur symbole de l’écart existant entre des visions de présidents hommes d’État et de présidents politiciens», accuse Éric Ciotti.

Pourtant, Emmanuel Macron s’est montré très volontariste sur la relance nucléaire à la veille de la présidentielle en février dernier, mais le député reste sceptique face au changement de cap présidentiel. «Ce revirement est naturellement salutaire pour autant qu’il soit sincère. Car on a du mal à suivre le chef de l’État et on a perdu beaucoup de temps. Le même Emmanuel Macron qui proposait au Parlement le vote sur une programmation pluriannuelle de l’énergie annonçant des fermetures, a annoncé ensuite des projets de constructions nouvelles. Mais quels que soient les discours, nous restons sous le régime d’une loi qui n’est toujours pas abrogée…», critique l’élu.

Il n’a pas oublié non plus la violente polémique de septembre ayant opposé le président d’EDF, Jean-Bernard Lévy, à Emmanuel Macron. Avant de quitter ses fonctions, le patron du nucléaire français avait expliqué devant le Medef pourquoi la relance du parc était compliquée compte tenu des décisions contradictoires de l’État. Jean-Bernard Lévy a dit la vérité. Et entendre la vérité a sans doute été douloureux pour M. Macron. Les incohérences de l’État actionnaire majoritaire sont une réalité , accable le député LR.

Jeudi, avant de quitter Poitiers et ses militants LR, Éric Ciotti s’est posé en défenseur fervent de la filière nucléaire. «Il n’y avait aucune raison de fermer Fessenheim. Nous devons faire confiance au progrès. C’est là où se trouve la vraie réponse au défi environnemental», a insisté le candidat. Avant de sauter dans un TGV vers la capitale, trois jours avant le grand débat télévisé des Républicains annoncé sur LCI.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*